Dans mon quotidien professionnel de psychopraticienne, je me retrouve souvent confrontée à ce brouillard hétéroclite des différentes professions qui émaillent le champ libéral de l’accompagnement thérapeutique et des questions qui en découlent.
Régulièrement, vous m’exprimez votre sentiment d’être perdu dans votre recherche d’un « psy », noyés dans les termes et parfois la masse de propositions… Vais-je choisir une thérapie existentielle ? Voir un psychothérapeute ? Être pris en charge par le dispositif « Mon soutien Psy »? Ma mutuelle rembourse t elle mes séances de psychothérapie ? C’est quoi un psychopraticien ?…
Et vous avez raison ! De prime abord, il est complexe de s’y retrouver dans tous ces termes. C’est pourquoi je vais vous faire un récapitulatif historique et spécifique de ces professions.
En France, c’est quoi un « psy » ? Cursus de formation ?
Tout d’abord, voici les définitions des professions de l’accompagnement les plus connues actuellement :
- Psychiatre : formation de médecin avec spécialisation en psychiatrie (7 années d’études). Il est habilité à prescrire des médicaments et à faire un diagnostic psychique.
- Psychologue : formation de 5 ans à l’université ou à l’école des psychologues avec une spécialisation possible en clinique (psychologue clinicien), en psychologie du travail…
- Psychopraticien : formation dans des écoles privées allant de 2 à 5 ans de formations sur une thérapie spécifique : thérapie systémique, hypnose, analyse transactionnelle, gestalt thérapie, thérapie psychocorporelle… En plus de sa formation, un psychopraticien connaît bien le processus thérapeutique pour avoir suivi lui-même une psychothérapie et questionne régulièrement sa posture en supervision (individuelle ou collective).
Du point de vue historique
Jusqu’à récemment, les souffrances psychiques étaient prises en charge majoritairement du point de vue médical et médicamenteux.
Dans les années 1900, l’émergence de la psychologie des profondeurs avec Freud et ses contemporains met à jour l’existence, entre autre, de l’inconscient. C’est une véritable révolution dans le domaine de l’accompagnement. La psychanalyse, avec son importance donnée aux mots, va alors irradiée dans la société.
Dans les années 50-70, d’autres courants psychologiques émergent. La psychologie humaniste (existentielle) met l’accent sur l’actualisation du Moi, les besoins (pyramide des besoins d’Abraham Maslow), les émotions (Art Mella explique très bien leur fonctionnement). La psychologie transpersonnelle, ensuite, insiste sur le besoin de transcendance qu’aurait chaque être humain et s’appuie sur les états modifiés de conscience pour accompagner en psychothérapie. De ces derniers courants apparaissent différentes écoles privées qui se structurent autour de tel ou tel outil thérapeutique : école de thérapie systémique, d’hypnose, de gestalt-thérapie, de somatothérapie.
Nous avons alors un florilège de professionnels de l’accompagnement thérapeutique qui, tous, peuvent prétendre au terme « psychothérapeute ».
Des dérives inhérentes à ce manque de cadre arrivent. En 1995, le suicide collectif de 16 disciples du Temple solaire sous la coupe d’un gourou autoproclamé psychothérapeute suscite l’émoi et active des réflexions pour lutter contre ces dérives…entre autre une réflexion sur l’encadrement de la profession de psychothérapeute. Ensuite, se mêle à cette réflexion un projet de refonte du système psychiatrique en France vivement critiqué. Je vous invite à cliquer ici si vous souhaitez en savoir plus.Finalement, une loi est réfléchie (depuis 2004) et proposée en aout 2009, suivie d’un décret en mai 2010, pour réserver l’utilisation du terme « psychothérapeute » à certains.
En 2012, les décrets d’application de la loi sont enfin sortis et effectifs : le terme « psychothérapeute » est réservé aux psychologues, psychanalystes et psychiatres (sous certaines conditions de connaissances en psychopathologie et de stages en institutions).
Ainsi, les personnes se formant en psychothérapie, hors de ces 3 branches) dans un cursus long, engageant et de remise en question de qualité ne peuvent plus utiliser le titre correspondant à leur activité (ils peuvent néanmoins utiliser le terme “psychothérapie” qui n’est soumis à aucune légifération).
Toute cette réflexion sur l’encadrement de la psychothérapie a bien sûr provoqué nombre de débats, de pour, de contre.
Les questions de fond restent : qu’est ce qu’un bon thérapeute ? Est-ce que 5 ans de formation universitaire suffisent à faire un bon thérapeute ? Comment s’assurer de la qualité d’un thérapeute ? …
Après 2012, le terme psychopraticien voit le jour suite à ces nombreuses réflexions. Il est définit comme un professionnel de l’accompagnement thérapeutique :
- ayant suivi une formation de qualité dans le champ de la psychologie
- ayant suivi lui-même une psychothérapie
- questionnant régulièrement sa pratique en supervision
- engageant une formation continue
Les 4 points étant un gage de qualité.
Professions réglementées et non réglementées
Les psychologues et psychothérapeutes sont des professions réglementées. La Société Francaise de Psychologie (SFP) a été créée en 1901. Vous pouvez lire l’histoire de la profession de psychologue ici. Leur exercice est encadré par la loi. Les psychologues doivent s’inscrire au répertoire ADELI attestant de leur qualification auprès des organismes de santé.
Les psychopraticiens sont des professions non réglementées. Elles évoluent hors du champ légal et ces titres ne sont pas protégées par la loi. Évidemment pour l’exercice de cette profession, chaque psychopraticien doit être inscrit au registre des métiers via l’INSEE, avoir un numéro de SIRET et avoir souscrit à une RC Pro.
Non réglementées ne veut pas dire de mauvaise qualité. Un bon psychopraticien a vu les mêmes notions théoriques qu’un psychologue. C’est juste que souvent il les a vues avec une visée ou dans une application pratique. Plutôt qu’une formation universitaire avec une prédominance de contenu théorique, un bonne formation de psychopraticien insiste sur la pratique des notions théoriques. Je crois sincèrement que les 2 approches sont complémentaires. Le fond théorique/réflexif permet de donner de la densité, de la texture à la pratique. Et nombre de psychologues se forment ultérieurement à des formations spécifique aux psychopraticiens (thérapie familiale, constellations…) pour enrichir leur pratique.
Vous pouvez trouver de mauvais psychologues qui n’ont pas fait de travail sur eux et ne remettent pas en question leur pratique comme vous pouvez tomber sur un psychopraticien n’ayant pas assez bossé les concepts et la théorie.
Concrètement aujourd’hui
Vous avez besoin d’un suivi psychothérapeutique et ne savez pas vers qui vous tourner ?
- Si vous avez besoin d’un traitement médicamenteux, allez voir un psychiatre. En fonction des lieux, il est difficile d’en trouver 1 mais ne désespérez pas. Vous pouvez passer par les CMP (Centre Médico Psychologique)
- Vous êtes dans une crise de vie, existentielle, relationnelle et vous avez envie de prendre du temps (et de l’argent!) pour faire le tri, décharger, changer, comprendre des fonctionnements, donc entamer une psychothérapie. Et là, vous avez le choix : aller voir un psychologue ou un psychopraticien.
Pour vous aider dans ce choix psychologue/psychopraticien, voici plusieurs pistes :
- Vous aimeriez une aide financière ? Le dispositif « Mon soutien Psy », anciennement “MonPsy”, peut vous permettre de financer en partie, via l’assurance maladie, un maximum de 12 séances de psychothérapie si vous êtes en anxiété légère. Pour cela, vous devez contacter un psychologue (ou passer par un 1er temps par votre médecin traitant) qui a adhéré à ce dispositif (annuaire ici) et voir avec lui à la 1ère séance si vous pouvez entrer dans ce dispositif. Autrement, certaines mutuelles remboursent des séances de psychothérapie…. renseignez-vous ! Certaines exigent que ces séances soient effectuées avec un psychologue (qui ont un numéro Adeli), d’autres pas…
- Les formations universitaires vous rassurent, trouvez un psychologue
- Vous aimeriez autre chose comme approche thérapeutique que la parole, allez chercher un psychopraticien ou un psychologue qui s’est formée en parallèle de sa formation théorique. Prenez le temps de fouiller ce qui vous conviendrait le mieux… L’hypnose ? Une approche systémique? Psychocorporelle ? Le rêve éveillé? Certains outils thérapeutiques sont doux, immersifs et vous plongent petit à petit au contact de vos émotions (rêve éveillé, visualisation, hypnose, respiration consciente), d’autres aident à comprendre, à y voir plus clair, à structurer (socio-génogramme, systémie), d’autres encore vous accompagnement dans le corporel, les sensations (toucher thérapeutique, somatothérapie). Et enfin certains sont spécifiques comme l’EMDR dans l’accompagnement de stress post-traumatique.
Et au-delà des outils thérapeutiques, l’important sera la relation thérapeutique. Vous sentez-vous à l’aise, en confiance avec ce thérapeute? Pouvez-vous lui exprimer ce qui va, ne va pas sans vous sentir jugé ou guidé dans une voie qui ne vous irait pas? Un bon thérapeute ne s’offusquera pas d’une remarque, de l’expression de vos émotions. Il prendra le temps d’aller à votre rencontre, de voir ce qui a été touché, de soulever avec vous vos blessures, vos manques et vos aspirations…ce que j’appelle la bienveillance sans complaisance. Car le thérapeute est aussi là pour vous amener à voir vos comportements, ce qui vous limite et ce qui est de votre responsabilité.
Alors maintenant que vous connaissez les différences entre les termes et les professions au sein de l’accompagnement psychothérapeutique, je vous souhaite un très beau cheminement avec ses montées, ses descentes et ses mouvements!